Clause pénale et clause prévoyant une indemnité de résiliation anticipée - mode d'emploi

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Article paru dans l'Officiel des Transporteurs et rédigé par Marie DUVERNE HANACHOWICZ, avocat associé, et Vincent RICHARD, avocat.

Clause pénale et clause prévoyant une indemnité de résiliation anticipée - mode d'emploi

Published on 07 October 2015
Dans les contrats ou les conditions générales se rencontrent très fréquemment des clauses prévoyant le versement d'une indemnité, soit pour sanctionner une inexécution des engagements contractuels — il s'agit de la clause pénale — soit pour sanctionner une résiliation anticipée. Ces clauses obéissent ainsi à la même logique qui est celle d'indemniser le cocontractant victime, mais elles obéissent à un régime bien différent.

 

Q : A quoi correspond la clause pénale ?

R : Selon un arrêt de la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation du 26 janvier 2011, la clause pénale se définit comme étant la clause par laquelle les parties évaluent forfaitairement et par avance l’indemnité qui devra être payée par le cocontractant fautif en cas d’inexécution du contrat (Cass. civ. 3ème, 26 janvier 2011, n°10-10376).

En matière de transport, on trouve fréquemment de telles clauses en cas de retard, d’avarie ou de perte de la marchandise. La principale caractéristique de la clause pénale est la faculté donnée par l’article 1152 alinéa 2 du Code civil au juge de la modifier, principalement à la baisse, lorsqu’elle est excessive au regard du préjudice subi : « Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite. »

Il s’agit d’une application du principe fondamental du droit français selon lequel le préjudice doit être intégralement réparé, sans perte ni profit.

Q : Et la clause prévoyant une indemnité de résiliation anticipée ?

R : La clause prévoyant une indemnité de résiliation anticipée (IRA) ressemble beaucoup à la clause pénale en ce qu’elle fixe à l’avance une indemnité qui sera attribuée au créancier.
Mais alors que la clause pénale indemnise une inexécution du contrat, autrement dit une faute du cocontractant, l’indemnité de résiliation anticipée est étrangère à toute notion d’inexécution.

Elle vient sanctionner la rupture anticipée d’un contrat à durée déterminée et généralement à exécutions successives. Elle procède d’un autre principe du droit français : l’intangibilité des contrats à durée déterminée.

En conséquence et contrairement à la clause pénale, elle n’est pas soumise au pouvoir modérateur du juge. C’est ce qu’a pu juger la Cour de cassation dans un arrêt du 18 janvier 2011 : « Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la clause stipulant une indemnité de dédit ne s'analysait pas en une clause pénale ayant pour objet de faire assurer par l'une des parties l'exécution de son obligation mais en une faculté de dédit permettant à la société Unicoop de se soustraire à cette exécution et excluant le pouvoir du juge de diminuer ou supprimer l'indemnité convenue, la cour d'appel a violé le texte susvisé... ». (Cass. Com., 18 janvier 2011, 0916.863)

Q : Dans quel type de contrat rencontre-t-on des clauses prévoyant une indemnité de résiliation anticipée ? Comment est évalué leur montant ?

R : Le contrat doit par définition être à durée déterminée pour qu’une telle clause puisse s’appliquer. On retrouve généralement ce type de clause dans les contrats de location et les crédits-baux (leasing) portant sur les véhicules, remorques, tracteurs, semi-remorques mais également sur le matériel informatique et autres photocopieurs.

En ce qui concerne ces deux contrats, l’IRA correspond à la totalité des loyers restant dus jusqu’au terme du contrat. On les trouve souvent dans les contrats de maintenance, eux aussi à exécution successive. Dans ce type de contrats, le montant de l’IRA dépend du mode de facturation de la maintenance :

  • Si la maintenance est facturée selon un montant forfaitaire à échéances régulières, l’indemnité sera égale à la totalité des forfaits allant jusqu’au terme du contrat ;

  • Si elle est facturée selon un  « relevé compteur » (en fonction du nombre de kilomètres ou de copies sans forfait fixe), l’indemnité sera évaluée en fonction de l’utilisation du matériel durant la période précédant la résiliation selon un pourcentage (80 ou 90% en général).

Q : Existe-t-il un moyen de contourner l’absence de pouvoir modérateur du juge ?

R: Certaines décisions ont admis que les clauses prévoyant une IRA constituaient un déséquilibre au sens de l’article L.442-6 du Code de commerce qui stipule qu'« engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers(…) » le fait « de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ».

Q : Quelles conséquences pour le locataire ou le bénéficiaire d'un contrat de maintenance au forfait ?

R : Les cours d’appels ayant rendu ces arrêts sur le fondement du déséquilibre significatif n’ont pas réduit le montant de l’indemnité mais ont, selon les hypothèses :

  • soit déclaré nulle la clause prévoyant cette indemnité (Cour d'appel de Paris - Chambre 5 section B - 19 Mars 2009 - N° 08/15591) ;

  • soit alloué des dommages et intérêts qui compensaient le montant de l’indemnité.

Toutefois, il ne s’agit pas d’une solution miracle car cette nullité n’a été admise que dans le cas particulier de la maintenance dite « au relevé compteur » (Cour d'appel de Paris - Chambre 5 section B - 19 Mars 2009 - N° 08/15591).

Plusieurs cours d’appel considèrent en effet qu’il n’y a pas de déséquilibre créé par la résiliation dans les contrats de location et les contrats de maintenance au forfait (exemple : Cour d’appel de Riom – 3ème chambre civile et commerciale – 8 avril 2015 – RGn°13/03205).

Elles considèrent qu’il serait particulièrement injuste pour l’organisme de location financière qui a acheté le matériel au fournisseur avant de le louer de se voir privé du bénéfice attendu en raison de la résiliation anticipée du contrat.

Il en est de même pour le prestataire qui s’engage à intervenir dans un certain délai et maintient un stock de pièces détachées correspondant au forfait de maintenance contracté.
Par conséquent, il reste difficile de cantonner ou d’éviter l’indemnité de rupture anticipée.

Q : Et dans le cas du bénéficiaire d'un contrat de maintenance dite « au relevé-compteur » ?

R : S’agissant de la maintenance dite « au relevé-compteur », le client est libre d’utiliser ou non son matériel et le prestataire n’attend pas une somme fixée d’avance.

Par conséquent, la rupture anticipée du contrat n’entraine aucun bouleversement significatif et la décision de la cour d’appel de Paris citée ci-dessus est parfaitement justifiée.

Toutefois, cette distinction n’a pas encore été confirmée par une décision de la cour de cassation. Dans l’attente d’une clarification, il est conseillé aux signataires d’un contrat de maintenance dite « au relevé compteur » désirant mettre un terme à celui-ci de ne pas le résilier pour éviter de payer l’IRA mais tout simplement de ne plus utiliser le matériel jusqu’au terme du contrat, aucune clause n’imposant généralement une utilisation minimale.

Par ce biais, le cocontractant fera échec à toute facturation tout en limitant le risque de condamnation.

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