Lorsque le Président d’une société est révoqué dans des conditions brutales et vexatoires, le dirigeant peut être indemnisé du dommage subi sur le fondement de l’article 1240 du code civil.
Dans cette affaire, une société à responsabilité limitée (SARL) exerçait les fonctions de Président au sein d’une société par actions simplifiée (SAS). Une assemblée générale extraordinaire a décidé la révocation du Président de la société. La SARL a contesté sa révocation en estimant celle-ci vexatoire et brutale et a demandé réparation de son préjudice moral.
La Cour d’appel de Versailles a reconnu que la SAS n’avait pas respecté son obligation de loyauté et devait réparer le préjudice subi par la SARL et son gérant. La Cour d’appel a condamné la SAS à indemniser le gérant de la SARL, tout en rejetant la demande d’indemnisation formée par la SARL en considérant que celle-ci ne justifiait pas d’un préjudice propre.
La SARL et son gérant se sont pourvu en cassation en estimant que « une société est en droit d'obtenir réparation du préjudice moral qu'elle subit ».
Dans l’arrêt du 30 mars 2022, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles en considérant que des dommages-intérêts auraient dû être attribués à la SARL dès lors que la cour d’appel retenait que la SAS avait révoqué brutalement et de manière vexatoire les fonctions de la SARL.
Cet arrêt est particulièrement important et son intérêt réside dans le fait que le dirigeant, victime de la révocation abusive, est une personne morale. Ainsi, une société, révoquée de ses fonctions de Président, peut obtenir réparation de son préjudice moral propre, causé par les conditions brutales et vexatoires de sa révocation.
Cet arrêt s’inscrit dans la lignée de plusieurs autres arrêts autorisant une personne morale à obtenir réparation du préjudice moral subi sur certains fondements (atteinte à l’image de sa marque, actes de concurrence déloyale à son encontre ou, par cet arrêt, révocation abusive de ses fonctions de Président) tandis que, pour certains autres fondements, dont les effets ne se manifestent que sur l’organisme d’une personne physique, la société ne peut solliciter une indemnisation (préjudice lié à un stress ou à une anxiété).